Crise politique et crise scolaire : quel lien ?

Il est pertinent de ne pas dissocier la désagrégation de l’autorité politique de l’affaiblissement contemporain de l’autorité enseignante. Ces deux phénomènes semblent en effet relever d’une même dynamique de défiance à l’égard des institutions et des figures légitimes.
On observe un parallèle troublant.
D’un côté, le populisme politique instrumentalise et centralise les aspirations populaires pour ébranler l’autorité établie, affaiblir les structures et opérer un renversement des valeurs substituant, par exemple, la complaisance envers la médiocrité à la quête d’excellence dans la gouvernance.
De l’autre, dans le domaine scolaire, le principe fondateur de la pédagogie active qui plaçait légitimement l’élève, ses besoins, son activité cognitive et son vécu au cœur des apprentissages pour les rendre plus significatifs est aujourd’hui souvent détourné de sa finalité.
Ce qui devait être une méthode de travail engageant l’élève dégénère trop fréquemment en un droit à contester systématiquement le savoir, les méthodes et l’autorité même de l’enseignant.

Ainsi, des élèves se permettent désormais de contester l’organisation d’évaluations conçues par des professionnels chevronnés, formés à la pédagogie.
Cette posture n’est pas sans rappeler celle de militants populistes zélés s’attaquant aux institutions républicaines et à des personnalités pourtant crédibles et respectées de l’administration.
Ces univers ( le politique et le scolaire ) s’influencent et interagissent au sein d’un même corps social. Les postures et les rhétoriques y circulent, d’où l’impérieuse nécessité d’une conduite responsable et d’un respect des cadres, quel que soit le domaine dans lequel on évolue.

La tendance à systématiquement aller à contre-courant des recommandations des institutions du savoir et de l’expertise ne mène qu’à l’impasse et à l’appauvrissement collectif. Nos enfants deviennent ce que nous leur montrons, ce que nous faisons et ce que nous valorisons par nos discours et nos actes. Si, collectivement, nous érodons les fondements de l’autorité légitime, du mérite et de la connaissance experte dans la sphère publique, comment pourrions-nous espérer les préserver dans l’enceinte des salles de classe ?
La restauration d’un pacte de confiance à l’école passe peut-être par un réinvestissement préalable des valeurs du débat démocratique, de l’écoute raisonnée et du respect des compétences dans l’espace politique.

Mafama Gueye

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